Le nom – Note

Le nom sur le bout de la langue

Note

Marie Vialle :

Quand j’ai lu Le Nom sur le bout de la langue, je m’y suis crue. Être sans cesse à la recherche de quelque chose d’impalpable et de perdu. Retenir indéfiniment les mots et les oublier sans cesse. Se sentir nue et fragile.
Affronter une immense vague de peur qui vient se briser sur moi et dans le même temps m’enrouler autour. C’est avec ces questions que je rentre dans les histoires de Pascal Quignard. Je veux être au plus près du dénuement et du silence. Partir de presque rien ; un tabouret, mon violoncelle et la lumière. Je joue du violoncelle, je joue la comédie, je joue tout court, je suis heureuse, j’ai raccroché les wagons. Mon violoncelle m’entraîne dans un autre monde auquel je n’ai pas accès avec des mots.

Photo Thierry Chassepo

Pascal Quignard :

J’admire le travail de Marie Vialle. J’ai associé trois contes pour elle. Ces trois contes n’en forment à vrai dire qu’un seul puisqu’ils concernent tous les trois l’origine de la voix. Dans la Fête des Chants du Marais, la mue fait perdre au jeune garçon la voix. L’arrivée de la sexualité chez tous les garçons est mêlée de voix perdues et d’un terrible dépit. À jamais un monde avant nous, perdu en nous, chante en nous. Le deuxième conte, Paradis, est consacré au coït et au cri qui le trahit. Comme nous sommes tous les fruits de la volupté sexuelle, cette joie crie dans chaque corps.
Dans le conte du Nom sur le bout de la langue enfin le nom propre se perd dans l’effroi. Comme dans la mort. Nous ne sommes pas une espèce qui « possède » le langage. Nous l’acquérons tant bien que mal à partir de l’âge de dix-huit mois jusqu’à l’âge de sept ans. Nous le perdons dans l’angoisse et plus encore en vieillissant. Le langage ne nous définit pas ; il défaille en nous.